Robert Delaunay peint en autodidacte, depuis quelques années, des paysages de style impressionniste quand il découvre, en 1905, au Salon des Indépendants les œuvres de Seurat et Van Gogh, et au Salon d’Automne la peinture fauve, Matisse et sa Femme au chapeau, les paysages de Vlaminck et de Derain…
L’année suivante, à nouveau au Salon des Indépendants où il expose des toiles proches du style de Gauguin, composées par masses compactes et lumineuses, il rencontre le Douanier Rousseau et Jean Metzinger. Celui-ci lui fait découvrir des écrits théoriques sur la couleur, ceux de Michel-Eugène Chevreul par exemple, qui le convainquent que les couleurs sont interdépendantes et interagissent entre elles en fonction de leur répartition dans le spectre. Le diptyque formé par l’Autoportrait de 1905-1906, et Paysage au disque de 1906 participent de ses nouvelles recherches.
Dans Autoportrait (Huile sur toile, 54 x 46 cm, 1905-1906, Musée national d'Art moderne, Paris), œuvre de transition, le visage, qui conserve toute sa lisibilité, est balayé par des touches de couleurs contrastées (vert et violet) qui s’opposent aux couleurs primaires du fond (rouge, jaune et bleu), esquissant, dans cet aller-retour visuel entre couleurs complémentaires et primaires, "la forme en mouvement" qui sera mise en place dans Paysage au disque, peint au verso, à la fin de l’année suivante.
Dominée par la forme vide d’un disque solaire blanc (le blanc étant la synthèse de toutes les couleurs du prisme), la composition est animée par des touches épaisses, en cercles de couleurs complémentaires qui s’élargissent et se reflètent dans la mer et sur le rivage. En naît une dynamique giratoire qui semble repousser les limites de la toile. Dans cette œuvre encore clairement figurative, "le soleil" [ressemble toutefois] beaucoup plus à un cercle chromatique qu’à l’astre d’où nous vient la lumière. Le titre lui-même […] renvoyant aussi bien au disque solaire qu’aux disques tournants dits de Newton ou de Maxwell. Ce qui s’élabore ici timidement (par rapport à la série des Formes circulaires), c’est le fait que le soleil n’est pas directement représenté, mais plutôt transposé sous forme d’analogie.
C'est donc une oeuvre manifeste portant au recto le dernier chef-d’oeuvre de la période fauve de Robert, l’Autoportrait de 1906, et au verso, un Paysage au disque de facture divisionniste incarne le tournant d’un art désormais entièrement fondé sur la couleur et la loi des contrastes simultanés antérieurement exploitée par Signac et Seurat.
" La lumière est la seule réalité.", Robert Delaunay.
---> Retour à l'index de L'Histoire du visage dans l'Art.
Écrire commentaire